(Contempler), Jean-Christophe Bailly, 2008

(...) Quant à la photographie de Marine Lanier, sans que je puisse être aucunement sûr de ce qui l’habite ou qu’elle montre, j’y vois avec certitude toute la puissance du dérobé que la photographie justement peut saisir. Montrer non pas tout bonnement ce qui est mais faire voir que ce qui est s’affaisse sur soi-même et se cache, telle serait ici l’hypothèse que la photographie développerait, ce qui suppose qu’elle refuse la distance du point de vue et qu’elle se renverse dans une volonté éperdue de saisie, où quelque chose d’un rapport stupéfié au vivant serait marqué mais non pas installé et cousu. La voie est ici celle d’une temporalité d’éclats ou celle d’une présentation brusque de l’impensable.
L’impensable qui est ce sous quoi nous errons et ce que, dans ses états toujours transis, la photographie contemple. On peut nommer aussi cela le visible et je le fais volontiers, quitte à mettre en boucle ce que j’ai tenté d’approcher : la plupart du temps le visible n’est pas même vraiment vu...Oui c’est vrai - mais un peu moins depuis que la photographie supplée à ce manque en s’appuyant toute seule contre l’inconnu (...)

Jean-Christophe Bailly, (Contempler), in Inframince 4, Cahier de l’ENSP Arles, co-édité ENSP / Actes Sud, 2008